Vous me posez souvent la question en consultation de l’intérêt ou pas du babycocoon. Ce matériel de puériculture peut paraitre séduisant. Effectivement, lorsque les parents le posent dedans, bébé semble être bien et arrête de pleurer presque instantanément car il se retrouve dans une position qui se rapproche de celle qu’il avait dans le ventre de sa maman. Les industriels en vantent également des mérites comme réduisant les reflux, la tête plate ou plagiocéphalie, …, mais est-ce vrai ?
Pour y répondre, il n’y a que très peu de publications scientifiques sur ce type de couchage du bébé, mais le peu de publications existantes mettent en garde sur leur danger et aucune ne montre un moindre effet positif pour bébé. Dans ce propos, il sera également présenté un point de vue personnel issu de mes observations au cabinet, d’échange avec d’autres ostéopathes, pédiatres et autres professionnels de la petite enfance.
Pour mieux comprendre l’intérêt ou non du babycocoon, le plus simple est de remontrer à son origine. L’histoire du babycocoon trouve son origine dans le service de néonatalogie de l’hôpital Nord de Marseille, développé par une kinésithérapeute pour aider les prématurés qui n’ont pas la musculature suffisante pour lutter contre la pesanteur et leur permettre également de retrouver un environnement rassurant comme dans le ventre de leur maman. Ce n’est que par la suite qu’il a été commercialisé au grand public pour les bébés à terme.
C’est pour ces enfants nés à terme ou pour les prématurés dont l’âge corrigé les considère à terme[1] que les inconvénients sont nombreux.
1. Au niveau des neurosciences tout d’abord
Un bébé né avant la 32-34e semaine de grossesse est un bébé dont la motricité est sous le contrôle des voies sous cortico spinales. C’est-à-dire qu’il est « programmé » pour être en triple flexion soit la position qu’il avait dans le ventre de sa maman d’où son utilisation dans les services de néonatologie pour les prématurés. Puis, entre la 34-41e semaine de grossesse le contrôle moteur est cortico spinal, ce qui permet au bébé de se « déplier ». Le restreindre va donc à l’inverse de sa physiologie.
Un bébé né à terme doit donc pouvoir être libre de ses mouvements pour pouvoir « se déplier » et pour cela il a besoin d’espace pour bouger ses jambes, ses bras, sa tête, son corps et pour découvrir sa motricité. Le babycocoon en le cocoonant et le restreignant dans sa mobilité aura tendance à fixer sa posture et donc à favoriser une plagiocéphalie, renforcer un torticolis ou un coté préférentiel. Au cabinet, j’observe une nette augmentation des plagiocéphalies avec une prise en charge plus tardive chez ces jeunes patients qui ont passé beaucoup de temps dans un babycocoon.
D’autre part, comme dit précédemment, cette contention réduit la découverte de sa motricité. Avec d’autres confrères, nous constatons un décalage dans le temps des acquisitions motrices chez ces bébés.
2. Danger pour les morts subites du nourrisson (MSN)
La HAS rappelle dans sa publication du 5 mars 2020 - Prévention des déformations crâniennes positionnelles (DCP) et mort inattendue du nourrisson (lien): « Les matériels de contention (cale-bébé, cale-tête, coussin de positionnement, réducteur de lit, etc.) sont inutiles, délétères et dangereux car ils peuvent favoriser le retournement ventral et augmentent le risque de décès asphyxique par enfouissement. »
En ostéopathie, nous avons un grand principe : « le mouvement c’est la vie ». Alors, pourquoi immobiliser bébé ? Ces enfants bloqués dans leur motricité en hyperflexion cervicale se retrouvent dans une position asphyxiante. Celle-ci peut entrainer des malaises obstructifs sur reflux (RGO) car les bébés ne peuvent se dégager la tête facilement en cas de reflux, celle-ci etant maintenue par le cocon. Une étude a montré que la majorité des photos de magazine, publicité, et autre, présentant le couchage du bébé dont le babycocoon montraient une mauvaise position du bébé, un mauvais environnement et un non-respect des recommandations de prévention de la mort subite du nourrisson.
Enfin, ces cocons pourraient favoriser les MSN, par leur côté trop moelleux et en augmentant la température de bébé.
En conclusion, je vous déconseille fortement l’usage d’un baby cocoon. Son utilisation est faite pour des bébés prématurés dont la maturité nerveuse n’est pas prête pour qu’il se déplie. Pour les bébés nés à terme, on remarque que son utilisation peut retarder l’éveil et le développement psychomoteur, qu’elle favorise les plagiocéphalies ou tête plate (cliquez ici pour l'article sur la plagiocéphalie et conseil de prévention). Enfin le plus grave, c’est qu'il favoriserait les malaises du nourrisson ou encore les MSN.
Si vous voulez cocoonez votre bébé, prenez le dans vos bras, dans ceux des grands-parents, … parlez lui, expliquez lui son environnement en mettant des mots, cela le rassurera. Si vous avez le sentiment qu’il est perdu dans son lit « réduisez sa taille » sans l’immobiliser. Pour cela, n’hésitez pas à demander conseil à votre ostéopathe, votre sage-femme, votre pédiatre ou médecin traitant, à la PMI ou autre personnel de la petite enfance.
Si vous voulez tout de même l’utiliser, utilisez le avec parcimonie (moins de 20 min par jour), jusqu’au 2 mois maximum de bébé et toujours sous surveillance.
[1] L'âge corrigé, c'est l'âge qu'aurait votre enfant s'il était né à la date prévue d'accouchement. Cet âge tient compte des semaines manquantes à la grossesse. L'âge corrigé est donc égal à l'âge chronologique moins les semaines manquantes.
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